NOTES

 

Le portrait qui suit doit beaucoup au Dictionnaire de Chaudon-Delandine, beaucoup à Diogène Laërce (ouvrage cité) et le reste à l'imagination de Hugo.

Voici l'article CHRYSIPPE du Dictionnaire, qui suit de près Diogène Laërce: « CHRYSIPPE, philosophe Stoïcien, natif de Solos dans la Cilicie, se distingua parmi les disciples de Cléanthe, successeur de Zénon, par un esprit délié. Il étoit si subtil, qu'on disoit "que, si les Dieux faisoient usage de la logique, ils ne pourroient se servir que de celle de Chrysippe." Avec beaucoup de génie, il avoit encore plus d'amour propre. Quelqu'un lui ayant demandé à qui il confieroit son fils? il répondit: A MOI; car si je savois que quelqu'un me surpassât en science, j'irois, dès ce moment, étudier à son école. Diogène Laërce a donné le Catalogue de ses ouvrages, qui, selon lui, se montoient à trois cents onze Traités de Dialectique. Il se repétoit & se contredisoit dans plusieurs & pilloit à tort & à travers ce qu'on avoit écrit avant lui. Ce qui fit dire à quelques critiques "que si l'on ôtoit de ses productions ce qui appartenoit à autrui, il ne resteroit que du papier." Il fut, comme tous les Stoïciens, l'apôtre du destin & le défendeur de la liberté: contradiction qu'il est difficile d'accorder. Sa doctrine sur plusieurs autres points étoit abominable. Il approuvoit ouvertement les mariages entre un père & sa fille, une mère & son fils. Il vouloit qu'on mangeât les cadavres, au lieu de les enterrer. Telles étoient les nobles leçons d'un philosophe qui passoit pour le plus ferme appui de l'école la plus sévère du Paganisme. Chrysippe déshonora sa secte par plusieurs ouvrages, plus dignes d'un lieu de débauche que du Portique. Aulu-Gelle rapporte cependant un fragment de son Traité de la Providence, qui lui fait beaucoup plus d'honneur. "Le dessein de la nature, dit-il, n'a pas été de soumettre les hommes aux maladies; un tel dessein seroit indigne de la source de tous les biens. Mais si du plan général du monde, tout bien ordonné qu'il est, il résulte quelques inconvéniens, c'est qu'ils se sont rencontrés à la suite de l'ouvrage, sans qu'ils aient été dans le dessein primitif et dans le but de la Providence." Ce philosophe mourut l'an 207 avant Jésus-Christ, d'un excès de vin avec ses disciples; ou, selon d'autres, d'un excès de rire en voyant un âne manger des figues dans un bassin d'argent. »

Et voici ce qui, dans Diogène Laërce, est absent du Dictionnaire et a pu inspirer Hugo: « Chrysippe, fils d'Apollonius, naquit à Soles, ou à Tarse [...]. Personne ne l'égalait pour la constance et l'assiduité au travail, témoin ses ouvrages, qui sont au nombre de sept cent cinq volumes. [...] Il avait la complexion délicate et la taille fort courte, comme il paraît par sa statue dans la place Céramique, et qui est presque cachée par une autre statue équestre, placée près de là; ce qui donna occasion à Carnéade de l'appeler Crypsippe au lieu de Chrysippe. [Note: Crypsippe veut dire caché par un cheval, et Chrysippe signifie un cheval d'or.] [...] Il mourut âgé de soixante-treize ans, dans la cent quarante-troisième olympiade [...]. Il paraît que le mépris faisait partie de son caractère, puisque d'un si grand nombre d'ouvrages écrits de sa main, il n'en dédia pas un seul à aucun prince. [...] » (p. 345 et suiv.) Mais, loin d'admirer Chrysippe, Diogène Laërce ne cache pas plus que Chaudon-Delandine que sa réputation était surfaite et ses oeuvres pleines de répétitions et de plagiats.